Marcel Amont, géant du music-hall et de la chanson

Mars 2023

Fort d’un répertoire à la joie communicative parsemé de nombreux succès dans les années 50 à 70, Marcel Amont a contribué à faire entrer le music-hall dans l’ère de la chanson française à la télévision. Il s’est éteint à l’âge de 93 ans.

©cAika/Dalle

Il se définissait humblement comme un interprète mais Marcel Amont était bien plus que cela. Une personnalité forte et pleine de bonne humeur, un « entertainer » comme diraient les anglo-saxons, qui devait beaucoup à l’esprit de sa région natale.
De son vrai nom Marcel Miramon, il nait le 1er avril 1929 à Bordeaux. Paysans autodidactes, ses parents ont quitté leur Béarn pour des emplois à la ville. À la maison, le poste de radio diffuse des chansons qui interpellent le jeune Marcel, qui les apprend et les chante dans la cour de l’école. Son baccalauréat en poche, il préfère une carrière artistique au métier de professeur d’éducation physique auquel il se prédestinait. Il joue du saxophone, se produit dans des bals, s’inscrit au Conservatoire d’art dramatique mais la chanson l’emporte peu à peu sur la comédie. En 1950, il s’installe à Paris afin de donner un élan à sa carrière naissante et enregistrer un premier disque.

En attendant de réaliser son rêve, il se fait un nom en se produisant dans les cabarets de la capitale où il croise la route de Sim, Fernand Raynaud et Jacques Brel. En 1953, il assure la première partie d’une tournée de Philippe Clay, et doit attendre encore trois ans pour que sorte son premier disque, sous le pseudonyme de Marcel Amont. L’attente en valait la peine puisque Escamillo connait un succès immédiat. Cette même année, il est engagé pour assurer la première partie d’Edith Piaf à l’Olympia, se voit sacrer révélation de l'année, enregistre son premier disque et obtient le Prix de l'Académie Charles-Cros et le Grand Prix du disque.

Sa popularité de chanteur grandit, aidée par sa gentillesse et sa bonne humeur. Il devient l’un des habitués de 36 Chandelles, célèbre émission animée par Jean Nohain. En parallèle, il fait ses débuts au cinéma avec un rôle dans La mariée est trop belle, aux côtés de Brigitte Bardot. La fin des années 50 le voit enchainer les succès, dont Julie (1957), Tout doux tout doucement (1958) et l’inoubliable Bleu, blanc, blond (1959), adaptation par Jean Dréjac du hit américain True, True Happiness.

Malgré l’avènement d’une nouvelle génération et l’explosion yé-yé, Marcel Amont poursuit sur sa lancée dans les années 60, avec des tubes où sa bonne humeur et sa légèreté lui permettent de conserver un public fidèle et une image dynamique : Bleuets d’azur, Dans le cœur de ma blonde… En 1962, son premier récital en solo a pour cadre Bobino. Claude Nougaro lui offre plusieurs chansons (Le balayeur du roy, Porte-plume, Le tango des jumeaux, Le jazz et la java…), tout comme Charles Aznavour et Jacques Plante dont Le Mexicain deviendra l’un de ses titres les plus emblématiques. En 1967, la télévision l’embauche pour présenter Amont Tour, toute première émission française en couleur.

Les années 70 confirment cette adéquation parfaite de son personnage avec le petit écran puisqu’il multiplie les apparitions, en particulier dans les shows à grande écoute de Maritie et Gilbert Carpentier. Côté tubes, la belle aventure continue avec L'amour ça fait passer le temps (1971), qui lui vaut de remporter le Prix Vincent-Scotto de la Sacem, Benjamin le bienheureux et surtout, Le chapeau de Mireille (1974) que lui offre son ami Georges Brassens.

La cinquantaine puis la soixantaine atteinte, les paysages de la chanson et des médias en plein renouvellement, les nouvelles chansons de Marcel Amont montent moins haut dans les hit-parades mais sa figure demeure très populaire, en particulier auprès d’un public resté très fidèle. Le temps joue pour lui à la faveur de la nostalgie de l’âge d’or du music-hall et de la chanson, qui confère un statut culte à quelques-uns de ses grands succès, et lui permet de se produire encore souvent sur scène de temps à autres, en particulier parmi les têtes d'affiche durant deux saisons d’Âge tendre, la tournée des idoles. À la même époque, en 2009, il fête ses 80 ans par une série de récitals à la Grande Comédie à Paris, tandis que dix ans plus tard, c’est sur la scène de l’Alhambra toujours à Paris qu’il souffle ses 90 bougies, entouré de nombreux artistes amis. Côté disques, il signe en 2018 un dernier album sur lequel il parcourt son répertoire avec Maxime le Forestier et Francis Cabrel, entre autres. Une reconnaissance de plusieurs générations pour celui qui aura interprété Aznavour et Nougaro, mais aussi Pierre Delanoë, Georges Moustaki, Alain Souchon, Jean-Loup Dabadie, Michel Legrand, Claude Lemesle ou encore Sylvain Lebel. Cette éternelle popularité, il la doit aussi à sa fidélité à ses attaches béarnaises, lui qui a enregistré des chansons traditionnelles et rendu hommage au terroir familial tant dans ses autobiographies que dans ses récits.

En 2020, Marcel Amont participe à la série d’interviews vidéo Les coulisses de la création de la Sacem où il avait raconté son parcours de vie, ses souvenirs avec ses collaborateurs.

Marcel Amont a été admis à la Sacem comme Auteur et Compositeur le 13 décembre 1963, et promu Sociétaire définitif dans la catégorie Auteur le 26 mars 1970.

 

"Marcel Amont était curieux de tout, un véritable humaniste des temps modernes. Excellent auteur lui-même, il savait divertir avec classe et émouvoir avec malice. Ce n'est pas par hasard que ses amis et admirateurs dans l'artisanat de la chanson s'appelaient Georges Brassens, Jacques Brel, Charles Aznavour et Alain Souchon, entre autres. Le virevoltant Marcel, qui, à 90 ans, épatait encore son public par son audace et sa souplesse, va manquer à nos scènes, mais demeurer dans nos cœurs."
Claude Lemesle, auteur, Président d’honneur de la Sacem.

 

 

Publié le 09 mars 2023